À l’heure où les acteurs de l’IA, réunis au sein du comité interministériel IA, appellent à revenir à une interprétation plus en phase avec la genèse du RGPD – fondée sur un accès aux données personnelles en fonction des risques encourus par sa/son titulaire -, le cabinet d’expertise économique Tera Consultants sous la direction du professeur Laurent Benzoni, a réalisé pour le compte du cabinet d’avocats spécialisé en affaires publiques, Samman, une étude portant sur l’impact économique des décisions de la Commission nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL).
Cette étude arrive à un moment clé pour l’économie de la donnée européenne, alors que s’ouvre le débat relatif au paiement pour l’accès à l’information sans publicité (« pay or consent ») au sein du Comité européen de la protection des données (EDPB) qui réunit les autorités nationales de protection des données européennes.
L’étude réalisée par Laurent Benzoni analyse spécifiquement les effets des lignes directrices de la CNIL sur les murs de traceurs (cookie walls en anglais) sur les éditeurs de contenus numériques et les consommateurs. Pour mémoire, ces lignes directrices – publiées en septembre 2020 – autorisent la pratique des murs de traceurs sous réserve du respect de deux critères d’évaluation : l’existence « d’alternative réelle et équitable » au service de l’éditeur ou à défaut pour les éditeurs « dominants », la possibilité d’accès au site en contrepartie d’un prix « raisonnable ».
« Cette étude arrive à un moment clé alors que s’ouvre le débat relatif au paiement pour l’accès à l’information sans publicité (« pay or consent ») au sein du Comité européen de la protection des données. »
L’étude montre qu’en s’appuyant sur les notions issues du droit de la concurrence, la CNIL outrepasse son mandat et ses compétences et place les éditeurs de contenu numérique dans une situation d’insécurité juridique majeure, entachant lourdement leur capacité d’innovation tarifaire et commerciale et in-fine leur liberté d’entreprendre.
Par ailleurs, en s’attribuant le pouvoir effectif d’évaluer ex-post le niveau du prix de l’accès aux services fournis par les éditeurs et en renvoyant les acteurs économiques à une appréciation « au cas par cas », la CNIL fait peser le risque d’un retour, de fait, d’un contrôle des prix qui n’est ni souhaité, ni souhaitable.
Laurent Benzoni pose en conséquence la question de l’utilité et de la finalité même de ces lignes directrices dont l’objet est précisément de guider les pratiques des acteurs ex-ante.
Il plaide finalement pour la mise en place d’un cadre réglementaire cohérent, concerté et réfléchi par les autorités de régulation concernées mais également les autorités de concurrence afin de de prévenir les conséquences négatives et dommageables pour les entreprises et les consommateurs.
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