Neuf jours après le vote de la censure du gouvernement de Michel Barnier à l’Assemblée nationale, François Bayrou a été nommé Premier ministre par le Président de la République.
Âgé de 73 ans, François Bayrou, agrégé de lettres et enseignant dans sa jeunesse, est un vieux routard de la vie politique française dont il incarne depuis 30 ans le centre-droit, pro-européen et plutôt pro-marché. Elu député pendant quasiment trois décennies, baron de la région de la Nouvelle-Aquitaine, membre de deux gouvernements, il a longtemps essayé de construire une force politique-pivot incontournable pour assurer des majorités gouvernementales, avant de connaître son heure de gloire en soutenant Emmanuel Macron lors de l’élection présidentielle de 2017 et d’obtenir un groupe parlementaire conséquent et quasi-incontournable à l’Assemblée nationale. Sa nomination au poste de Premier ministre est pour lui la consécration de sa carrière politique (cf. la biographie détaillée en pièce jointe).
Le nouveau Premier ministre aura donc la responsabilité de former un gouvernement susceptible de survivre au vote d’une motion de censure d’une Assemblée nationale sans majorité. L’étape suivante sera l’adoption de la loi de finances spéciale, dont le projet a été adopté hier en commission à l’Assemblée nationale. Pour rappel, elle permettra au Gouvernement de percevoir les impôts jusqu’à l’adoption d’une loi de finances. Une fois la loi promulguée, le gouvernement prend des décrets ouvrant le minimum de crédits qu’il juge « indispensables » pour poursuivre l’exécution des services publics, sous réserve des crédits ouverts par la dernière loi de finances de l’année précédente.
Le gouvernement devra trouver le véhicule législatif pour pouvoir allouer les recettes aux dépenses spécifiques ou ajustées par rapport à 2024, soit par une loi de Finances soit par un texte spécial. A cet égard, un texte transpartisan pourrait être déposé rapidement en procédure d’examen accélérée. Si ces textes sont adoptés, le Gouvernement aura les moyens jusqu’aux prochaines lois de finances de pouvoirs travailler ad minima sans avoir besoin de passer par le Parlement.
Le nouveau Premier ministre aura donc la responsabilité de former un gouvernement susceptible de survivre au vote d’une motion de censure d’une Assemblée nationale sans majorité. L’étape suivante sera l’adoption de la loi de finances spéciale, dont le projet a été adopté hier en commission à l’Assemblée nationale.
La composition du gouvernement est attendue dans les jours qui viennent. Dans l’attente, le projet de loi de finances spéciale sera examiné en séance publique à l’Assemblée nationale ce lundi, en présence du ministre du Budget et des Comptes publics démissionnaire, comme la Constitution le permet.
L’annonce de la nomination de François Bayrou a plutôt été accueillie avec circonspection et réserve par les principaux partis de l’opposition à la coalition gouvernementale sortante, qui se sont contentés d’indiquer les lignes rouges à ne pas franchir pour qu’ils ne votent pas une nouvelle motion de censure. Seul le parti d’extrême-gauche La France Insoumise a annoncé son intention de censurer le futur gouvernement par principe.
La loi spéciale et les mesures d’urgence devraient donc être adoptées sous réserve de l’absence d’un nouveau rebondissement inattendu et devraient permettre à l’Etat et au pays de fonctionner. Sur la suite, tout dépendra du talent des nouveaux dirigeants du pays à trouver les compromis nécessaires, les lignes rouges des uns étant souvent les exigences des autres, dans un contexte assez similaire à celui du Gouvernement dirigé par Michel Barnier.
A suivre donc. Prochain épisode : l’annonce de la composition du prochain Gouvernement.
Biographie de François Bayrou
Âgé de 73 ans, François Bayrou, agrégé de lettres et enseignant dans sa jeunesse, est un vieux routard de la vie politique française dont il incarne depuis 30 ans le centre-droit, pro-européen et plutôt pro-marché. Il a fondé le parti politique Mouvement Démocrate (MoDem) en 2007 après avoir dirigé les différentes entités de cette même famille qui se sont succédées depuis les années 1990. Il a été élu à quasiment tous les échelons locaux de sa région d’origine, la Nouvelle-Aquitaine, jusqu’à la Présidence du Conseil Général des Pyrénées-Atlantiques, et est maire de Pau depuis 2014. Il a également exercé différentes responsabilités et mandats au niveau national, parmi lesquels ceux de député pendant près de trois décennies, de ministre de l’Education nationale de 1993 à 1997 et plus brièvement de Garde des Sceaux et ministre de la Justice en 2017 dans la foulée de l’élection d’Emmanuel Macron, poste dont il a été obligé de démissionner en raison des poursuites judiciaires dans le cadre de la fraude aux emplois des assistants parlementaires européens (abandonnées en 2024 pour insuffisance de preuves). Il a longtemps essayé de construire une force politique-pivot incontournable pour assurer une majorité gouvernementale, avant de connaître son heure de gloire en soutenant Emmanuel Macron lors de l’élection présidentielle de 2017 et d’obtenir un groupe parlementaire conséquent et quasi-incontournable à l’Assemblée nationale. Sa nomination au poste de Premier Ministre est pour lui la consécration de sa carrière politique.
- Né en 1951 à Bordères dans les Pyrénées-Atlantiques, fils d’un propriétaire agriculteur et ancien maire de Bordères, François Bayrou est agrégé de Lettres et débute sa carrière comme professeur dans les Pyrénées-Atlantiques de 1974 à 1979 ;
- Jeune militant et responsable local du parti Centre des Démocrates Sociaux (parti de centre-droit/démocrate-chrétien, CDS) depuis 1974 à l’âge de 23 ans, il a été le Président de plusieurs partis centristes et de centre-droit : le CDS de 1994 à 1995, Force démocrate (FD) de 1995 à 1998, l’Union pour la Démocratie Française (parti de centre-droit fondé en 1978 pour soutenir le président de la République en fonction, Valéry Giscard d’Estaing – UDF) de 1998 à 2007 avant de fonder le MoDem en 2007, dont il est toujours le président ;
- En 1979, il rejoint le cabinet du ministre de l’Agriculture, Pierre Méhaignerie, dans le Gouvernement de Raymond Barre (présidence de Valéry Giscard d’Estaing) en 1979 comme chargé de mission ;
- Il est élu en 1982 conseiller général des Pyrénées-Atlantiques et préside le Conseil général de 1992 à 2001. La même année il est élu conseiller régional d’Aquitaine ;
- Il est conseiller du président du Parlement européen, Pierre Pfimlin, de 1984 à 1986 ;
- En 1986, il est élu député de la 2ème circonscription des Pyrénées-Atlantiques, réélu jusqu’en 2012 ;
- Il entre au Gouvernement en 1993 comme ministre de l’Education nationale sous les présidences de Jacques Chirac, portefeuille qu’il conservera avec un élargissement de ses compétences à l’Enseignement supérieur, à la Recherche et à la Formation professionnelle jusqu’en 1997;
- Il est élu député européen après avoir dirigé la tête de liste du parti centriste lors des élections européennes de 1999. Il quitte le Parlement européen en 2002 pour privilégier son mandat de député national ;
- En 2014, il reprend la ville de Pau aux socialistes et dirige depuis la municipalité et la Communauté d’agglomération de Pau Béarn Pyrénées ;
- Seul allié institutionnel du candidat Emmanuel Macron lors de la campagne pour l’élection présidentielle en 2017, il est nommé Garde des Sceaux et ministre de la Justice au sein du 1er Gouvernement dans la foulée. Il est contraint de démissionner un peu plus d’un mois après sa prise de fonction en raison des poursuites dont il fait l’objet dans l’affaire des emplois présumés fictifs au Parlement européen du MoDem. Les poursuites seront abandonnées en 2024 pour insuffisance de preuves ;
- En 2020, le Président de la République Emmanuel Macron créé pour lui le poste de haut-commissaire au Plan, chargé d’animer et de coordonner les travaux de planification et de réflexion prospective conduits pour le compte de l’Etat et d’éclairer les choix des pouvoirs publics ;
- Il s’est présenté à trois reprises à l’élection présidentielle : 2002, 6,84% des suffrages ; 2007, 18,57% des suffrages ; 2012, 9,13% des suffrages, et appelle à la surprise générale à voter pour le candidat socialiste et vainqueur de l’élection François Hollande, opposé au candidat sortant de droite Nicolas Sarkozy ;
- Comptant parmi les soutiens de la première heure et considéré comme un fidèle du Chef de l’Etat, il est vice-président d’Ensemble, qui rassemble toutes les forces politiques qui soutiennent Emmanuel Macron.